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Jeudi 27 Septembre 2018

Flavien Berger : « On ne vient pas voir un concert pour écouter un disque plus fort »

Demain sortira le très attendu nouvel album de Flavien Berger, Contre-temps. Personnage fantasque et poète mélomane, il nous a immergé, le temps d’une interview, dans son univers parallèle. Rencontre. 

Salut Flavien, tu vas bien ?
Oui, je discute avec un de mes plus vieux amis sur les rapports des membres dans une société, leur poids les uns vis-à-vis des autres et de ce que signifie être marginal et lutter contre l’ordre établi, voilà.

Est-ce que tu te définis comme marginal ?
Ah non, pas du tout, parce que je ne me frotte pas aux choses, au contraire. Je suis plutôt un résidu de ce qui m’entoure, et je m’en inspire, donc je ne crois pas être un marginal.

Et ta musique est-ce que tu la décrirais comme marginale ? Comment est-ce que tu pourrais la définir ?
C’est un peu difficile pour moi de définir ma musique. Ma musique c’est le résultat de plein de morceaux de musique. Tous ceux que j’ai fait jusqu’à présent et tous ceux que je ferai dans le futur. Tous ces morceaux-là ne se ressemblent pas forcément, même s’il y a des liens et un prisme, qui est moi. Ce que j’ai remarqué, c’est que beaucoup de gens aiment ma musique pour différentes raisons, donc pour différents morceaux. Du coup je pense que ma musique n’est pas marginale mais elle est un peu anarchique ce qui fait qu’il n’y a pas forcément de règne d’un morceau sur un autre.

D’ailleurs, tu as commencé la musique en créant des morceaux sur ta PlayStation, tu écoutais quoi à ce moment-là ?
A l’époque j’écoutais beaucoup de hip-hop et beaucoup de rap avec mon frère. Il a directement écouté du rap quand c’est arrivé en France, du coup il avait – et il a toujours – plein de vinyls de rap américain, de rap Français. J’en écoutais beaucoup, au collège et dans le quartier où je vivais. Donc c’est de la culture de l’instrumental et du vocal dont je viens. Je faisais des instrus, pas forcément pour rapper mais en tout cas pour y ajouter potentiellement une voix.

Est-ce que tu peux me citer une de tes influences rap / hip-hop, américain ou français, sans forcément réduire à une seule chanson ?
C’est difficile… Hier avec mes copains on écoutait Raekwon The Chef qui est un membre du Wu-tang Clan. Il y a tellement de trucs en termes d’influence… Ça se bouscule.

Un petit coup de cœur dans ce genre, que tu écoutes toujours avec plaisir ?
The Infamous de Mobb Deep qui est son premier album et qui est extraordinaire. Mais j’écoutais aussi beaucoup de musique noire américaine, de soul, de jazz, parce que c’est ce que mon père écoutait. Mais j’étais quand même dans une branche de ce qu’on appelle aujourd’hui la musique urbaine, c’est-à-dire que c’était une musique populaire à caractère rap. Et à ce moment-là, j’ai réalisé que, quand on écoute un genre de musique, la plupart des genres sont en confrontation les uns avec les autres. Par exemple, quand j’écoutais du rap français, écouter du rock ce n’était pas bien, et quand on écoute du rock, écouter du jazz, ce n’est pas bien… Un jour, j’ai découvert qu’en fait, cette confrontation c’était une structure mentale et que tout se nourrissait mutuellement, comme dans n’importe quel art. Donc quand j’ai commencé à faire de la musique, je me suis rendu compte qu’on pouvait ne pas avoir d’église.

Donc tu es plutôt pour le décloisonnement des genres, et ça se retrouve dans ta musique ?
Je crois. Disons que ce n’est pas un programme, ce n’est pas quelque chose que j’ai écrit et que j’ai appliqué, c’est quelque chose que je ressens. De toute façon, je suis plutôt dans le décloisonnement des genres en règle générale, sans non plus surfer sur les thèmes actuels. Je crois qu’il peut y avoir des périodes où il y a des genres, mais qu’il faut les redéfinir, comme quand on fait une culture au sens premier du terme : quand on cultive des choses, on ne peut pas cultiver tout le temps la même chose au même endroit parce que sinon, c’est sclérosant. Donc il faut changer d’espèces, il faut mélanger les variétés, comme ça les choses mutent, continuent à évoluer et à vivre.

Est-ce que justement c’est ça qui fait la spécificité de tes lives ? Le fait de cultiver à chaque fois quelque chose de nouveau et de le réinventer ?
Je ne pourrais pas faire autrement. En plus, j’ai commencé à faire des lives hyper tard, en 2014. Je n’avais joué que trois ou quatre fois avant et à chaque fois c’était différent. Je me suis posé la question de savoir ce que je voulais faire, ce que je voulais que les gens voient, écoutent, tout en me faisant plaisir.

Pour que ça me fasse plaisir, il faut qu’il y ait de l’excitation et ça, c’est lié à l’imprévu. Comme quand on va ouvrir un paquet cadeau et qu’on ne sait pas ce qu’il y a dedans. C’est toujours agréable de monter sur scène et de ne pas vraiment savoir ce qui nous attend. Sinon c’est horrible et je pense que ça se ressent. Je tiens à rester sur quelque chose d’artisanal, avec des possibles accidents. Pour pas mal de morceaux, les lives sont une revisite des morceaux du disque. On ne vient pas voir un concert pour écouter un disque plus fort, on vient d’une part pour voir l’artiste dont on écoute la musique mais aussi pour voir comment il s’empare des choses. Je pense que c’est une curiosité qu’il faudrait que l’on ait pour vivre un instant qui ne ressemble en rien aux autres. Si tu viens voir mon live dans différentes villes et que c’est le même, là ça sent la supercherie. Je ne fais pas des tours de magie, je fais de la musique et je pense que pour chopper un sentiment, une émotion, il faut que je choppe un truc qu’il n’y a que ce soir-là, qu’il n’y a que dans cette salle-là, qu’il n’y a qu’avec ces gens-là.

Ces moments, tu les prépares ou tu y vas au feeling avec tes machines ?
Je n’ai jamais répété de live, mais maintenant je commence, parce que je vais sortir un nouveau disque et que je vais jouer de nouveaux morceaux, que j’ai un vrai public. Quand j’ai commencé mes lives, non pas que je les prenais avec légèreté, mais c’était acceptable de faire un peu n’importe quoi. Maintenant j’ai plus l’impression qu’il faut que je respecte un minimum les morceaux donc qu’il faut que ça s’organise pour pouvoir surfer entre les anciens et les nouveaux. Mais je sais qu’il y a toujours des moments sans parachute. Si c’est un peu plus structuré, ce n’est pas non plus scénarisé.

Justement on va parler de ton album Contre-temps, prévu pour septembre prochain, dont tu viens de sortir un second morceau 9999999 que tu qualifies toi-même de « vestige d’hologrammes qui s’adressent aux léopardiens », est-ce que tu pourrais nous en dire plus ?
Oui je pourrais, mais est-ce que c’est vraiment intéressant ? Justement, ce bâillement qu’il y a entre tous ces mots, ces énigmes qui posent un cadre visuel… je ne sais pas si j’ai envie de te le définir tu vois, ça ne serait pas très intéressant parce que je vais rentrer dans une narration que je veux laisser en floue justement, en buée tu vois. Donc oui, je pourrais te dire que les léopardiens ce sont les personnages en filigrane dans le disque, que c’est une caste mystérieuse qui joue avec le temps, que les vestiges d’hologrammes seront ce qu’on laissera dans un futur lointain aux archéologues.

J’imagine des résidus de messages, comme la sonde voyager… Ou bien, comme dans les années 1980, lorsque Carl Sagan a chapeauté l’envoi d’un message dans l’espace à on ne sait pas qui. J’aime bien l’idée que la musique ce soit aussi ça ; un message que tu envoies dans le temps comme tu envoies un voyager dans l’espace. J’envoie des fusées sous forme de morceaux qui, peut-être, de manière virtuelle, resteront dans l’histoire.

Qu’est-ce qui différencie Contre-temps de Léviathan ?
Ma vie a beaucoup changé depuis Léviathan. Ce que je sais, c’est que je crois être dans de nouveaux questionnements, alors que je suis toujours dans les mêmes. C’est-à-dire ce qui habite un mec qui va faire un album, un livre ou un scénar. Tu te retrouves toujours face à tes même peurs, tu crois que c’est la première fois que tu les vis et en fait ce sont les mêmes, amplifiées ou pas. Mais comme elles sont dans le présent, elles sont amplifiées par rapport au souvenir que tu en as. Ce que je veux dire, c’est que je me suis posé des questions pendant que je faisais Contre-temps, et je croyais que c’était la première fois que je me les posais, mais le disque fini je me suis rendu compte que c’était exactement les mêmes que pendant que je faisais Léviathan ou pendant que je faisais mes EP. J’ai toujours eu ce rapport de confiance/inquiétude avec la création d’un disque.

Est-ce qu’on peut dire qu’il est plus personnel par rapport à Léviathan ?
Dans les textes, je suis persuadé de quelque chose, c’est que j’ai essayé de quitter la candeur exotique d’un ailleurs fantasmé pour parler de notre réalité. J’ai quitté ça pour quelque chose de beaucoup plus proche de la sensation, du ressenti. De la sensation de ce qu’il se passe dans le cerveau de quelqu’un, quand il se frotte au temps, quand il se frotte à ses sentiments. Est-ce que c’est personnel ou pas je n’en sais rien, parce que dire que c’est personnel, ça revient à dire que c’est intime et ça veut dire que c’est ma vie. Or ce n’est pas ma vie, je ne raconte pas ma vie, enfin je ne raconte pas des choses que j’ai vécues personnellement mais je pense que je suis plus proche du cerveau humain quand il est en train de se poser des questions sur sa vie que je ne l’étais avant. Dans Léviathan et dans les disques précédents, je suis presque dans de la fantasy tu vois, une histoire fictionnelle à caractère fantastique alors que là je suis plus de la sensation à proprement parler.

Tu parles beaucoup de science-fiction pour décrire tes albums, c’est un univers qui résonne beaucoup en toi, est-ce que tu es plutôt cyberpunk ou space opera ?
Le problème c’est que le cyberpunk peut lui-même être space opera. Mais je dirais que je suis complètement cyberpunk. Je suis même plus cyberpunk que steampunk. Cyberpunk ça me va vachement, même s’il est très nihiliste et que ça va forcément droit dans le mur… or moi je suis vraiment très optimiste. C’est juste en ça que je ne suis pas cyberpunk.

Sur cet album à venir, on entendra les voix de Julia Lanoë et de Bonnie Banane, comment est-ce que tu choisis les personnes avec qui tu travailles ?
Comme pour le reste : par amitié, par désir de collaborer, par envie de voir émerger quelque chose, par évidence aussi. Quand je fais un morceau et que tout à coup j’entends la voix d’amis ou de musiciens que j’ai croisé, je ne prends pas trop le temps de réfléchir et je leur envoie un texto pour leur dire « je fais un morceau, je crois que tu devrais être dessus, est-ce que ça te dirait ? ». Pour l’instant, je ne me suis pas trompé, parce que la réponse était toujours dans la continuité de l’évidence.

On te souhaite quoi après la tournée que tu as déjà entamée et la sortie de Contre-temps ?
D’être heureux, de ne plus avoir peur et d’être serein quoi. Je ne sais pas trop, le bonheur ? C’est ce qu’il faut souhaiter aux gens, non ?

Et pour tes projets professionnels ou musicaux, on te souhaite quoi ?
On verra. Ce qui est important c’est de faire des beaux projets, qu’ils aient du sens et qu’ils résonnent dans ma vie comme dans celles de ceux qui les écoutent ou qui les voient… Donc ça ne se prépare pas. Se dire : « je voudrais faire ça dans deux ans », c’est dangereux, parce que ce sont des prophéties auto-réalisatrices et ce n’est jamais très bon. Je pense qu’il faut prendre les choses comme elles viennent et peut-être faire des projets transversaux. En fait, le kiff c’est quand on fait un truc et qu’on se dit « wahou, si tu m’avais dit que je ferais ça l’année dernière, je n’y aurais pas cru ». C’est ça le vrai kiff, c’est de se faire peur ou de se surprendre à faire des choses que l’on n’aurait jamais anticipées. Je ne dis pas qu’il faille avancer les yeux fermés mais en termes de travail, il faut avoir les antennes levées et se dire que derrière chaque jour se cache un projet surprenant.