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Lundi 05 Novembre 2018

Jeanne Added « Je pense que l’on est en mutation constante »

Après la sortie de Be Sensational, un premier album qui avait révélé la talentueuse rémoise, Jeanne Added revient avec Radiate. Présente à Marseille à l’occasion de la Fiesta des Suds, elle nous parle de son parcours, de ses inspirations et de son rapport à la scène, rencontre.
Tu as une formation jazz, que l’on n’entend pas forcément quand on écoute tes albums. Pourquoi avoir choisi de t’en éloigner ? Qu’est-ce que tu en gardes dans ta musique, ou ta manière de travailler ? 
Alors dans le jazz moi j’étais interprète, j’ai chanté la musique des autres pendant des années, et j’ai choisi de m’en éloigner pour pouvoir écrire ma musique. Après ce que j’en garde c’est un peu de souplesse je pense, étant donné que le jazz c’est de l’improvisation, c’est une façon d’envisager la musique comme un terrain de jeu plutôt qu’un endroit où il faut faire les choses bien ou pas bien, et où on va avoir raison ou tort. Moi, je ne vois pas les choses comme ça, ça vient sans doute de là.
 
Radiate est un disque plus pop, plus doux que le premier Be Sensational, que s’est-il passé entre ces deux albums ? 
Oui effectivement, il y a plein de chose qui se sont adoucies, apaisées. Sur ce deuxième album, ce qui m’a donné du drive c’est le désir de continuer à apprendre, à écrire des chansons, de meilleures chansons. Là où le premier geste, à mon sens, avait été très brut, j’avais envie de développer l’écriture, de la travailler, d’aller plus loin. Donc la nature a un peu changé.
 
Même ta voix a changé, comment tu l’expliques ?
C’est très simple, sur le premier album, étant donné que ce n’était pas facile de faire sortir ce que j’avais besoin de faire sortir, j’ai beaucoup réduit. C’est comme la pression dans un jet d’eau par exemple, réduire le diamètre pour que la pression soit plus forte et que le geste soit plus clair, plus condensé. Mais au bout de 200 concerts a chanter dans une tessiture qui était plus petite que celle que j’utilisais depuis des années et que je me connais aussi, j’ai eu envie de retrouver un peu ma voix.
 
J’ai lu quelque part que tu t’étais inspirée du roman Babylone Babies pour le titre Mutate. Y a-t-il d’autres références dans cet album ? 
Je ne les ai pas en tête, j’ai une mémoire de poisson rouge, mais évidemment il y en a d’autres… je prends des notes tout le temps, quand j’écoute la radio, quand je suis en période d’écriture, si je regarde des émissions, quand je lis un livre, quand je regarde un film... Il me semble que je pensais à Jankélévitch, j’ai entendu des émissions sur ce gars-là qui a beaucoup écrit sur la musique, ça fait partie des choses dont j’ai le souvenir d’avoir pris des notes. Il y eu Dantec évidemment, Despentes encore, Ozu aussi, et puis c’est beaucoup le monde qui m’entoure... Mais en fait ce que j’aime bien quand je prends des notes comme ça, c’est de lire ou d’entendre une façon de percevoir le monde qui correspond à ce que je sens, mais formulée de manière brillante et éclairante, ça me fait vachement de bien.
 
 
 
Dans cet album il y a une réflexion autour de l’idée de grandir, d’évoluer. Tu es passée par beaucoup d’étapes avant d’arriver là où tu es aujourd’hui ?
Bien sûr, et puis je pense qu’on est en mutation constante, et qu’on existe par le lien. Mon père, qui est philosophe, a une grande théorie sur le fait qu’on existe par le lien qu’on a avec les autres, et que c’est ce rapport aux autres qui nous définit. Je trouve ça très beau comme idée. Je lui pique toutes ses idées (rires) : rien n’est à moi, mais rien n’est à lui non plus, tout comme rien n’est à toi, etc. Tout circule, et ça me bouleverse constamment, je trouve ça passionnant ! Je sens physiquement le changement :  pas forcément instantanément, mai faire un concert, rencontrer des gens, voir les musiciens avec lesquels je vais partager la scène, croiser quelqu’un dans la rue pour dire bonjour, tout a une incidence ! Je ne serais pas là si je n’avais pas eu la vie que j’ai eu avant, et ce que je vis en ce moment n’aurait pas pu arriver avant parce que ça se passe maintenant.
 
Nos lecteurs, étudiants, sont eux aussi en pleine mutation. Tu aurais un conseil à donner à un jeune musicien qui veut se lancer ? 
Ce qui a été compliqué pour moi, c’est le manque de confiance. Mais ce n’est pas forcement grave, c’est un truc qui est très commun, on a l’impression que le monde est trop grand, qu’on n’a pas les épaules. Pour moi ça a pris vachement de temps… j’ai fait un premier album à 34 ans ! Ça ne veut pas dire que je n’ai rien fait avant mais tout arrive et c’est ça que j’ai envie de dire aux plus jeunes, ayez moins peur ! Je sais que ce n’est pas possible de ne pas avoir peur, mais il faut avoir confiance parce que ça arrive ,et ça arrivera au bon moment : quand tu es prêt en fait !
 
Ne pas se précipiter…
Si tu as ça en toi, l’envie de te précipiter, alors précipite-toi ! Mais si tu n’as pas ça et que tu n’y arrives pas, il vaut mieux faire la paix avec toi-même parce que c’est un coup à se rendre malheureux, à s’en vouloir, à se juger, à se comparer, etc. Il faut faire la paix avec les endroits où l’on galère parce que ce n’est pas grave, c’est ce qui est constitutif de nous, et quand ça se dénoue, ça donne de la matière ! Il faut avoir confiance, si ce n’est en soi, dans le fait que le temps travaille pour nous. Si tu es attentif à ce qui se passe, à qui tu es, à ce qui t’entoure et aux gens avec lesquels tu vis, tout va bien se passer ! 
 
 
 
Tu écris et composes seule. Comment tu transposes ce travail sur scène, avec des musiciens ?
Ça c’est une grande question ! J’imagine que tout le monde sait ce que c’est de chanter une chanson que tu connais, que tu entends à la radio. C’est exactement la même chose sauf que l’on travaille en amont, on répète pour que ce soit bien pour tout le monde, pas juste pour moi sous la douche. Et après le but du jeu c’est que moi je sois là, mais aussi d’être là tous ensemble, avec l’équipe technique même, c’est un truc qui se passe aussi avec tout ce qui est lumière, son etc.
 
Et comment ça se passe pour toi le live ? L’échange avec le public ?
C’est un endroit où je me sens bien. Je dis souvent - parce que j’y ai réfléchi - que c’est étonnant quand les gens sont touchés par ce que tu fais sur scène, j’ai vu des gens être bouleversés parfois, c’est très difficile, ce n’est pas possible de prendre ça pour soi. Si quelqu’un est bouleversé c’est forcément par lui, par ses propres émotions. Ils se projettent et se reçoivent à nouveau, augmentés, teintés de ce que l’on fait sur scène, mais avec une saveur différente. C’est parce que je suis présente et que je prends du plaisir à faire de la musique, à chanter, à danser, qu’en face il va pouvoir y avoir un échange d’énergie. Je me projette dans ce que je sens de la réception des gens et je me reçois à nouveau, mon boulot c’est d’être là et c’est ça qui me plait.
D’ailleurs on parlait de confiance, la scène est un moment qui permet de s’oublier un peu, tu es à la fois très toi et à la fois tu disparais un petit peu, ça semble contradictoire mais c’est mon expérience. Le troisième œil s’en va, tu n’es plus entrain de te juger, de te comparer, ou de te dire que ce n’est pas assez ceci ou pas assez cela, tu es juste présente, et ça, ça suffit à me donner envie de remonter sur scène tous les jours !